Transilien de minuit 35 : Poésie par inadvertance

I’m sorry for English-speakers, but this is a French only story. It’s about how language that seems normal to those who speak it and vulgar to some of those who hear it, can actually be utterly poetic, in a weird, comical and touching way. It’s about a guy trying to shake a friend up after a bad night, a bad few years even, but in a drunken, colorfully expressed, night train argument. And you don’t get to read it, because I like letting you believe that it’s amazing. 

“Frère, la vérité, t’as fait le pédé, t’aurais pu danser avec des noix de coco à la place du caleçon, ç’aurait été la même. Je te laisse, je vais en boîte sans toi, je fais le pédé, je te dis je suis plus marocain. Le Coran de la Mecque, moi je rentre pas en boîte sans toi, j’essaie même pas, la vie d’ma mère !

– Arrête de dire le Coran, arrête de dire la vie d’ma mère juste parce que t’es bourré.

– Ch’uis pas bourré, j’dis juste si je fais ça, ch’uis plus marocain…

– Frère, tu te comportes déjà pas comme un marocain, t’es pas respectueux des gens…

– Nan, mais moi je me démène pour te montrer que t’es une statue, t’es une gargouille, t’es un présentateur Canal +. Moi je suis pas hypocrite. Le jour où je reste avec toi jusqu’à 6 heures du mat’, tu te rappelles, tu me dis “t’es un pédé de pas être resté jusqu’à midi, t’es une gargouille”, mais moi j’ai des problèmes à 6 heures du mat’, déjà, et toi tu comprends pas. Je suis pas hypocrite, moi, j’ai un pote qui est en chien, j’ai pas de répit. Le Coran d’la Mecque, je brûle en cendres si j’ai pas raison.

– Alors brûle en cendres.

– Je peux pas, j’ai raison ! Ça se voit dans tes yeux, toi tu as trois alter-égos. J’ai essayé de t’épargner quand t’es rentré, mais t’as fait l’orgueil, alors je suis obligé de te montrer t’es qui ! Moi je préfère insulter un imam que de rentrer en boîte sans toi. On a une différence d’éducation, on a une différence de retenance. T’as pas retenu ce qu’on t’a appris, c’est pas une différence de darons. Toi tu peux pas dire c’que j’dis parce que tu fais pas c’que j’dis, moi je peux dire c’que j’dis.

– Moi je dis ce que je fais.

– Tu dis ce que tu fais, mais tu dis pas c’que j’dis. Quand tu bois tu as des alter-égos. Moi ch’uis pas comme ça, moi. Moi y’a d’l’alcool, y’a d’la beuh, y’a quelconque, je change pas, je reste calme. Y’a une meuf en boîte, elle me propose des trucs, je les prends pas. Au lieu de faire la fleur, là, on entame le débat. La vie d’ma mère, mon rôle c’est de te faire comprendre des trucs.

– Essaye d’être empathique, frère, essaye d’écouter. T’es qui pour me dire quoi faire ?

– Eh, ferme ta chatte, c’est pas l’expert, c’est pas YouTube. La vérité, depuis 2008 c’est le pire temps de ta vie. Il y a que toi quand t’as tord, tu parles. Même Ben, quand il a tord, il parle pas. Ben il dit rien, mais c’est pour toi, il veut pas prendre parti contre toi. Moi j’te comprends, Ben. (Ben regarde droit devant et n’a aucune intention de participer à la conversation.) Tu fais le Blanc, frère. Fais pas le Blanc. Fais le Congolais, mais fais pas l’Africain avec moi.

– Je suis Africain…

– Nan, mais c’est comme il y a les gens du Congo, et il y a les Congolais, il y a les Africains et ceux qui font les Africains, fais pas le mec, je dis juste, tu rentres sans moi en boîte, tu fais le Blanc. Le Coran d’la Mecque, fais pas ça.”

C’est le coeur lourd que je suis descendue du train, voulant en entendre plus et espérant ardemment qu’on m’explique en quoi ça consiste de “faire l’Africain”.